Seoul 2016
En 2016, on m’a demandé de commenter les photos prises par Françoise Huguier à Séoul, pour le livre et l’exposition VIRTUAL SEOUL. Tout n’a pas été utilisé. Voici les textes, avec un aspect inévitablement composite.
La Corée du Sud et le mercantilisme
Les marchés géants, lointains héritiers de marchés paysans, dont certains ont toujours lieu les jours en 4 et en 9 comme autrefois, sont une sorte de maillon manquant avec le grand magasin moderne, la ville-magasin. Tout cela date naturellement de l’occupation japonaise, qui a privilégié les environs des vieilles portes de la ville, pratiques et dégagés. Mais ce n’est qu’après la guerre de Corée que ces marchés ont explosé, appuyés sur le marché noir et la terrifiante pauvreté d’un pays presque intégralement détruit.
Aujourd’hui les plus célèbres marchés se sont en quelque sorte redressés, oubliant la rue pour la verticalité (marque du moderne depuis le Japon), comme Namdaemun ou surtout Tongdaemun. On pourrait jouer au jeu du ‘Que ne vend-on pas dans ces magasins ?’ Ca amuserait les enfants.
Accueilli avec forces courbettes à l’ouverture, le client est englouti dans un univers pluriel. Plus moderne sera le magasin, plus il sera recherché, et plus les prix seront élevés, terriblement élevés. Le client ne s’affole pas. Là comme partout on lui propose des cartes de crédit. Chaque vendeur, chaque écran le lui rappellera. Combien de couples ruinés par la fièvre acheteuse. L’usage de la carte (il y en a pour toutes les marques) a remplacé le recours à la prêteuse et au marché plus ou moins noir dont il reste quelques représentantes sur les marchés traditionnels.
Dans ces immenses magasins, dans ces dédales multi-fonctionnels, il faut absolument faire un tour à l’étage alimentaire. Certes, manger dehors est plus que fréquent et même quasi obligatoire (pas question d’inviter chez soi ou de rentrer déjeuner à midi), mais l’affluence est phénomènale tout autant que fortement créatrice d’emplois. En fait, tout est fait pour qu’on reste dans le magasin, et là encore chacun s’y emploie. Pour cela, un personnel en nombre impressionnant, ce que soulignent rarement les laudateurs du miracle.
Patrick Maurus
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